Cette situation (voies aériennes étroites sans recul associé de la mandibule et du maxillaire) est certes rare, d’autant plus que l’on avance en âge, car, en vieillissant, les structures osseuses du visage se « remodèlent » et reculent (c’est notamment l’une des causes de l’apparition de lèvres fines, d’un visage creusé et de l’apparition de rides marquées chez le sujet âgé). Néanmoins, pour de très rares patients qui présentent une apnée obstructive du sommeil, le maxillaire et la mandibule sont en bonne position. Que peut-on leur proposer pour les aider à guérir ?
La solution est venue du professeur Hermann Sailer, ancien chef de service de chirurgie maxillo-faciale à l’hôpital universitaire de Zurich en Suisse. Afin de permettre à des patients a priori non éligibles à la chirurgie orthognatique de bénéficier de ce traitement, il a eu l’idée de modifier les protocoles chirurgicaux pour finalement mettre au point une méthode chirurgicale radicale pour la guérison des apnées obstructives du sommeil qui s’applique aux patients qui n’ont pas de recul du maxillaire ni de la mandibule.
Il a en effet réussi à modifier, par voie chirurgicale, le positionnement de ces structures sans avancer le maxillaire. La technique utilisée s’apparente à une rotation (antihoraire) du maxillaire qui oblige à une avancée de la mandibule. Elle consiste à avancer le maxillaire qui est en rapport avec le pharynx, mais sans pour autant le déplacer vers l’avant. Cela est possible par une rotation du maxillaire, en prenant comme point de rotation la partie située la plus en avant de celui-ci. Ainsi, le maxillaire s’avance à l’arrière (c’est ce qui nous intéresse) puis le chirurgien place la mandibule en rapport avec le maxillaire. Pour se faire, il doit donc l’avancer. C’est un peu technique, et il n’est pas nécessaire de rentrer dans le détail ici, mais globalement, ce que l’on peut retenir, c’est que le Pr Sailer a démontré qu’il était possible d’obtenir des taux de guérison très élevés (proche de 100 %) grâce à ce protocole pour tous les patients. Cette technique peut également être associée à une avancée du maxillaire (et de la mandibule) afin d’optimiser les résultats. La guérison est alors la règle dans l’immense majorité des cas.
Après avoir rencontré le professeur Sailer à l’Hôpital universitaire de Zurich dans les années 1990 nous reproduisons avec l’ensemble de mon équipe de Paris (à la clinique Blomet) et de Toulouse (à la clinique de la Croix du sud) très exactement son protocole initial : avancée et rotation antihoraire du maxillaire et de la mandibule. Nous retrouvons des taux de guérison comparables aux siens. L’ensemble des protocoles ont été enrichis par une simulation tridimensionnelle systématique de l’intervention avec mesure du volume des voies aériennes supérieures en amont de l’intervention. Celle-ci est renouvelée au troisième mois post opératoire. Une disparition des symptômes liée à l’apnée obstructive du sommeil, associé à un IAH inférieur à 5 ou à 10 (en fonction de la valeur initiale pré opératoire) et à une augmentation du volume des voies aériennes calculée à partir du scanner confirme la guérison dans l’immense majorité des patients opérés. Ceci s’associe le plus souvent par une normalisation de la tension artérielle (lorsque les patients présentent une HTA), et nous constatons également des baisses du taux du LDL cholestérol pour les patients qui avaient une hypercholestérolémie.